Formation des collectivités territoriales libyennes

Formation des collectivités territoriales libyennes et des universités pour reconstruire le pays

Depuis fin 2017, le CIEDEL s’engage avec le Comité des Régions (représentants des autorités régionales et locales des États membres au sein de l’Union européenne) auprès des universités et collectivités territoriales libyennes pour appuyer la décentralisation émergente, clé de voûte du processus de stabilisation et de reconstruction du pays et des institutions. Après une première phase d’échanges pour faire émerger les principaux besoins de formation au printemps 2017, un plan de renforcement de capacités a rapidement été amorcé pour entretenir une dynamique vitale.

Une décentralisation rapide dans un État déstabilisé

En 2012, quelques mois après la destitution de Mouammar Kadhafi, la loi 59 sur l’administration locale a lancé la décentralisation en Libye. Le cadre reste relativement instable (ce n’est pas une surprise au vu de l’état politique et économique du pays, et de l’absence totale de décentralisation sous Kadhafi), mais le pays a connu des avancées. La plus notable concerne sans doute la tenue d’élections locales, à partir de 2014, qui ont donné un début de légitimité aux collectivités territoriales.

Le processus accuse du retard, mais les maires récemment élus ont commencé à s’organiser et sont demandeurs d’appuis et de retours d’expériences qui leur permettent de faire (mieux) fonctionner leur collectivité. Il semble crucial de commencer à travailler dès aujourd’hui avec ces Maires et leurs collectivités pour donner du souffle à la reconstruction du pays.

Permettre aux collectivités territoriales libyennes d’assumer leurs responsabilités

Aujourd’hui, les collectivités territoriales libyennes font ce qu’elles peuvent pour répondre aux demandes des habitants – notamment en services de base – alors que certaines villes ou villages ont été détruits à plus de 30% pendant la révolution. Un challenge, alors qu’elles manquent encore d’autonomie financière et d’expérience en termes de planification et de gestion.
Pour permettre le renforcement immédiat et durable des collectivités territoriales, alors que la situation reste très tendue dans le pays, il est vite apparu que les universités libyennes pouvaient avoir un rôle essentiel dans la mise en place d’offres de formations adaptées aux collectivités locales.

Un processus de travail pour adapter la formation des universités aux besoins des collectivités territoriales

Un atelier d’échanges sur les besoins de formation des collectivités territoriales libyennes a eu lieu en Mai 2017 en Tunisie (le cadre tunisien se prêtait mieux à une rencontre pacifiée qu’en Libye). Ce temps de rencontre a rassemblé les responsables des RH des municipalités et des représentants des universités de 7 villes libyennes, couvrant les 3 principales régions historiques du pays. Plusieurs objectifs ont été fixés pour cette rencontre :

  • comprendre le contexte de la décentralisation ainsi que la situation des collectivités territoriales, afin de mieux identifier les besoins de formation ;
  • connaitre les universités libyennes et explorer les moyens par lesquels ces dernières pourraient aider les municipalités à assurer la formation de leur personnel ;
  • établir une coopération entre les municipalités et les universités pour créer une communauté désireuse de travailler ensemble.

La rencontre a confirmé qu’il y avait une réelle demande de renforcement des compétences. Les municipalités nouvellement créées manquent manifestement de compétences pour mettre en œuvre les services à la population et cherchent à avoir des exemples d’autres pays qui ont récemment connu la décentralisation. Le besoin de formations professionnelles en lien direct avec la réalité des collectivités locales a été souligné.

Une action rapide pour entretenir la dynamique

A l’issue de l’atelier de mai, les municipalités et les universités libyennes ont convenu de mettre en place rapidement un premier parcours de formation comprenant 6 thématiques identifiées comme prioritaires, articulées en 2 blocs de 9 jours de formation :

Bloc 1

  • Planification territoriale
  • Mise en place des services
  • Rôle des municipalités en temps de crise

Bloc 2

  • Gestion de projet
  • Management et gestion des ressources humaines
  • Ressources financières des collectivités territoriales

Au total, 9 villes ont participé à ces actions de renforcement (Benghazi, Beni Ulid, Ghariyan, Sabha, Sirte, Tobruk, Tripoli, Zawia, Zintan). Chacune était représentée dans les formations par un enseignant de l’Université et un représentant de la collectivité territoriale, qui participaient à l’ensemble des formations. Il était important que ce « binôme » participe aux formations ensemble, pour faciliter le rapprochement des cultures des institutions et permettre une continuité dans l’action.
Par ailleurs, pour chaque module, un technicien de la collectivité territoriale concerné par la thématique était invité.

Deux priorités pour faire vivre le processus à moyen terme

Le processus a aussi fait intervenir le Centro per la Cooperazione Internazionale (Italie) et le CCDD (Association for Cooperation, Culture Sustanaible Developement in Tunisia). L’objectif est de pouvoir poursuivre avec deux axes de renforcement déjà identifiés.

L’une des priorités concerne le renforcement de la collaboration universités – collectivités territoriales, et l’accès facilité à des contenus techniques. L’idée est de créer une plateforme de gestion de documents et d’échanges ouverte à l’ensemble des membres des Universités et collectivités territoriales engagées dans le processus. La plateforme a trois objectifs :

  • La mise sur pied d’une communauté capable d’échanger et de partager des documents produits collectivement ;
  • La mise à disposition des guidelines de plusieurs modules de formation du CIEDEL particulièrement utiles pour les collectivités territoriales, pour faciliter la construction de modules de formation adaptés sur place ;
  • La mise en ligne par les universités libyennes de documents qui leur semblent intéressants pour alimenter le processus de décentralisation et le travail des collectivités territoriales.

Par ailleurs, le CIEDEL, le Comité des Régions, les universités et les collectivités territoriales ont entamé un travail pour mettre sur pied un cursus de formation plus complet et articulé, avec un travail d’identification des thèmes et la description détaillée des contenus.

L’ambition est de pouvoir placer les bases de ce cursus début 2019 en proposant une session de travail avec les universités et quelques collectivités territoriales :

  • 2 jours de travail pour valider les axes d’un cursus possible ;
  • 4 jours de formation de formateurs dans les universités pour aborder les spécificités de la formation d’adultes et en particulier de la formation d’élus.